LA PRINCIPAUTE DE SALM - SALM

Carte principaute de salm

Quelques notes sur la Vallée de la Plaine et le Comté de Salm tirées des revues l’ESSOR de Schirmeck :

Avant 1598 le ?omté de Salm s’étendait de la Broque près de Schirmeck à la région de Badonviller, sa richesse principale était les mines de fer et les forges de Grandfontaine, source de conflits entre les comtes de Salm d’une part, l’abbaye de Senones et les évêques de Metz d’autre  part dès 1259 .

On peut voir les anciennes carrières de minerai, exploitées pendant environ 500 ans, en suivant le sentier minier de la Tête Mathis au dessus des Minières à Grandfontaine . La mine de Grandfontaine avec un petit musée se visitait autrefois, elle est fermée au public pour des raisons de sécurité . On accédait par une galerie à une grande salle, une sorte de grotte, résultat de l’extraction du minerai. Les étages inférieurs sont noyés.

On peut se documenter avec le n°158 de l’Essor : article de Denis LEYPOLD « les forges de Framont-Grandfontaine et Champenay du XIII° siècle à la Révolution, ou le n° 113 de 1981 « les  mines de Grandfontaine-Framont-les Minières ou encore dans la revue PIERRES et TERRE n°31/32 de juin 1988 édité par la Fédération Patrimoine Minier, Institut des Sciences de la Terre à Strasbourg.

En 1598 le Comté de Salm fut partagé entre deux héritiers de part et d’autre de la rivière la Plaine, Christine de Salm reçut en dot la partie Ouest avec Badonviller. Elle épousa François Lorraine-Vaudémont qui devint duc de Lorraine sous le nom de François II. Dès lors toute la partie à l’Ouest de la rivière devint lorraine avec perception de péages au passage des ponts. Raon fut coupé en deux, d’où le doublon Raon sur Plaine- Raon lès Leau. Quarante- quatre maisons de Raon sur Plaine ,situées rive droite,  furent détachées de ce village  et formèrent Raon-lès-Leau, l’un dans le 88 et l’autre dans le 54. Bionville fut formé de la même manière avec les maisons rive droite des villages de Luvigny, Vexaincourt et Allarmont. On peut remarquer les Croix de Lorraine sur les volets de maisons à Raon-les Leau sitôt passé la rivière.

Je lis dans ce n° de mars 1993 que Raon ou Ravon désigne la jonction de deux cours d’eau.

Il y a Raon sur Plaine, Raon-lès-Leau, Raon- l’Etape, la Petite- Raon près de Senones : ne pas mélanger !

Comme au Ban de la Roche, la Guerre de Trente Ans (1630-1648) et la peste dévastèrent  la Vallée de la Plaine qui fut repeuplée avec des familles venues de l’extérieur.

La Guerre de 1870 fit de Raon- sur- Plaine et de Raon- lès- Leau des villages frontière. Raon-sur- Plaine était rattaché depuis 1793 au canton d’Allarmont, puis en 1805 à Schirmeck. En 1871 le village fut d’abord annexé par l’Allemagne, ainsi que Raon-lès-Leau qui était dans le canton de Lorquin. En 1872 un nouveau tracé de la frontière rend les deux villages à la France mais l’Allemagne conserve les riches forêts qui les entourent : 1100 ha sur le territoire de Raon-lès-Leau, 700 ha sur celui de Raon-sur-Plaine. La victoire de 1918 n’a rien changé, c’est toujours Grandfontaine  qui encaisse  les revenus fonciers et qui conserve le hameau du Donon. Ainsi le secteur du Roulé Bacon ne dépend pas de Raon-lès-Leau mais de Grandfontaine.

Episode de la Guerre 1914-18, tiré d’un article de M. Jules Valentin, Maire Honoraire de Raon- sur-Plaine, paru dans  l’Essor de Mars 1993: « Dès  le 3 août 1914 des patrouilles allemandes venant du Donon tentèrent de descendre jusqu’à Raon. Une première fut stoppée à l’emplacement du  futur mémorial des évadés et passeurs. Le chef du second détachement est tué par le douanier français Joseph Mangin de Raon- l’Etape qui était posté dans un jardin : l’Allemand tombe sur la route, son cheval qui s’est emballé galope jusqu’au cimetière où il est abattu. Les Allemands n’insistent pas et remontent au Donon le corps de leur chef. Le 8 août, une cinquantaine de soldats allemands ennemis reviennent : ils saccagent la mairie, s’emparent du drapeau de la façade et se dirigent vers la gare qu’ils entourent : ceux qui se trouvent d’un côté croient voir des soldats français à l’opposé. Ils tirent et tuent deux des leurs. On a su par la suite qu’un soldat avait tué son frère se trouvant dans le même détachement. J’avais cinq ans à cette époque, mais je revois toujours ces soldats remontant bien tristement vers le Donon, leurs deux morts couchés dans le tombereau à herbes de Mme Gustave Valentin.

A propos de la Bataille du Donon un article de l’Essor n° 141 de déc 1988 de M. Arnold Kientzler d’après la relation  de Louis Sadoul parue en 1922 ( la Guerre dans les Vosges) : le 14 août  1914, jour de la prise du premier drapeau allemand à St Blaise ( entre Saales et Schirmeck), le 21° Bataillon de Chasseurs à pied s’empare du Donon sans grande résistance du côté allemand. Mais le 20 août les Allemands contre-attaquent, ils sont d’abord repoussés et se retranchent sur  le Petit Donon. Les Français essayent de les déloger de cette position formidable, en vain; ordre est donné de battre en retraite, 114 Français sont tombés au Petit Donon, 94 à la route d’Abreschwiller… Les pertes allemandes furent sensiblement égales. Le soir du 21 août, les Français se retirent par la vallée de la Plaine en abandonnant le Donon ( conséquence de la défaite de Sarrebourg-Morhange) .Les Allemands vont fortifier ce secteur pour contrer un éventuel retour des Français,(voir les fortifications du Donon, secteur Nord et secteur Sud vers la Corbeille où des visites commentées sont organisées chaque été, se renseigner au Syndicat d’initiatives de Schirmeck).

Après la bataille du Donon du 21 août, l’armée allemande occupera les villages de Raon sur Plaine  et Raon –lès-Leau durant toute la guerre : il y eut 23 victimes à Raon- sur –Plaine.

Entre 1939 et 1945 on dénombre 13 victimes dans le village. l’ancienne frontière de 1872-1918 avait été rétablie après la défaite de juin 1940 et les deux Raon se trouvaient dans une cuvette restée française entourée de forêts alsaciennes avec un débouché vers Luvigny d’environ 900m. C’est par ces forêts que, malgré de nombreuses patrouilles allemandes, 16000 prisonniers de guerre français évadés des camps d’outre- Rhin ont pu regagner leurs foyers en passant par chez nous où ils trouvaient aide et réconfort. Ce fut le cas du Général Giraud accueilli dans  le chalet  de M. Antoine Benoit  à  la côte du Trupt. » Le Gén. Giraud s’était évadé de la forteresse de  Koenigstein près de Dresden que j’ai visitée il y a déjà bien longtemps du temps de la R.D.A. On nous a montré l’endroit où il est passé par-dessus le mur d’enceinte.

 

grand chemin d'allemagne

Les Auges de Martimont

A propos du Chemin d’Allemagne: article de l’Essor n°156 : il est appelé Voie Romaine à cause du pavage en larges dalles de  grès. «  Il semble avoir assuré  la liaison entre Tarquimpol, carrefour routier  important sur  la voie Strasbourg-Metz et  le Donon. Par endroits le revêtement dallé a disparu. On le retrouve aux Auges de Martimont. Etrange endroit pour cet abreuvoir, loin de tout ruisseau. Un article de  Georges EPPE paru dans  l’Essor ( n°156) traite de cette question : «  Ce Grand Chemin d’Allemagne aujourd’hui déserté était à l’époque «  la Nationale 4 ». Ces auges placées sur les Chaumes de Martimont servaient de relais et  là , les charrois s’arrêtaient pour faire boire  leurs  montures qui venaient de peiner sur ce long chemin d’Allemagne : cet axe vit en effet passer des Rois, des hommes d’armes et aussi tous les colporteurs nombreux qui passaient de  l’Alsace  vers la Lorraine ou vice versa avec des convois de minerai de fer, de bois de chauffe et de construction, de sel et de grains.

La pomme de terre venant de Strasbourg est arrivée en Lorraine par ce Chemin d’Allemagne…le grand Turenne qui venait de passer la nuit à l’Abbaye de Haute Seille pour la campagne d’Alsace a aussi emprunté ce tracé. C’est ce qu’on racontait  le soir lors des veillées.

Pour ravitailler en eau tous les attelages de passage, une navette était mise en place. L’eau venait de la Basse Verdenal. En 1982, après une mini tornade, ces mémorables témoins furent cassés par des chablis. Le club Vosgien de Cirey - Val et Châtillon scella au mieux ces vestiges pour que reste présente l’histoire des Auges de Martimont ».

Carte vestiges circulation donon

« Au col de Roulé-Bacon le chemin se scinde en deux voies. L’une, non pavée, continue sur  la crête en direction du Donon, l’autre, pavée, s’incurve vers le Sud et descend à flanc de montagne (pente  moyenne 14%, dans la vallée de la Plaine. L’étroitesse de ce chemin ne permettait pas le croisement des attelages, il faut imaginer des règles strictes, par ex une circulation à sens unique.

La technique de construction diffère de celle des voies romaines: ici les dalles sont posées à même le sol. Le pavage daterait plutôt du XIIIe siècle, l’exploitation des mines de fer de Grandfontaine nécessitait une quantité  importante de bois qu’il a fallu chercher de plus en plus loin. Cela aurait justifié la construction d’un tel chemin. C’est en 1437 que le Chemin d’Allemagne semble  mentionné pour  la première fois sous ce vocable. Sur le cadastre de Raon-lès-Leau  de 1838  il est dénommé Chemin du Blanc Rupt.

De Raon un chemin rejoignait les Minières et la vallée du Framont en remontant de l’autre côté de la rivière par la vallée des Goudiots, la Crache et l’Etoile I ; cet  itinéraire est  plus court de 1,5 km, par rapport à celui généralement adopté par le Col entre les deux Donon.

Le chemin du haut passe sous la Chaume de Réquival, on y voit  par endroits des traces de roulage, il descend à la Croix de Fer qui semble avoir été un carrefour important sur la ligne de séparation des eaux entre  la vallée de la Plaine, affluent de la Meurthe, puis de la Moselle et le bassin de la Sarre. Il croisait là le chemin qui montait depuis Raon et descendait dans la vallée de la Sarre blanche  vers l’ancienne scierie du Pâquis.

De la Croix de Fer le chemin gagnait le Col entre les deux Donon et descendait sur Schirmeck et surtout sur Wisches.

La vallée du Blanc Rupt est déserte aujourd’hui, on est surpris de voir une mairie à Turquestein sans village autour. Il n’en a pas toujours été ainsi. Le curé de St Quirin a écrit à ce propos dans la revue l’Essor de sept 1992 : « Au xx siècle la merveilleuse vallée de la Sarre blanche ou Blancrupt était parsemée de huit maisons forestières, quinze scieries et dix-huit fermes. Bourdonnante ruche de bûcherons, ségards,flotteurs, éleveurs et laboureurs. A l’époque, ni route , ni prés. Simplement la petite Sarre, un chemin carrossable et la forêt. Maisons dans  les clairières et les basses, moulin de Ricarville et scieries sur  l’eau. A l’entrée de la vallée, le Château des évêques de Metz, un des plus anciens de Lorraine, une forteresse inaccessible au dessus de la Sarre en un point stratégique déjà occupé par les Romains. Il fut démantelé en 1634. ». L’auteur de l’article s’attache ensuite à évoquer la petite chapelle Notre-Dame de Délivrance, ancien lieu de pèlerinage et de marché.

Idem pour la vallée du Ruisseau du Val, située  plus au Sud : « aujourd’hui déserte, elle était bien vivante au siècle dernier, il y avait une grande ferme au Thon près de la source de la Vezouze. Le  garde particulier des forêts logeait au rez-de-chaussée tandis que le premier étage était réservé aux propriétaires qui venaient tantôt en vacances, tantôt pour chasser (chasses aux sangliers, aux cerfs ou aux coqs de bruyère alors très  nombreux) ou encore s’occuper de leurs forêts. Dans la région de Cirey, la ferme était connue et avait une bonne renommée. Elle servait de but de promenade et l’on pouvait aussi s’y restaurer. Une voie ferrée de 60 cm de large reliait la ferme à la plaine, elle servait au débardage des tronces vers les scieries du Marquis et autres » (article de Jean Simon dans ce n° 156 de l’Essor consacré à Turquestein-Blancrupt).

scierie du marquis ruisseau du val

Scierie du Marquis, grand bâtiment déserté dans  la vallée du Ruisseau du Val, en amont de Val et Châtillon

 

« On utilisait le ruisseau jusqu’en 1905 pour le flottage du bois. Les flottes de bois formaient des radeaux , des retenues aménagées de loin en loin permettaient d’augmenter le débit au passage du train de bois. Il fallait vite ouvrir ces petits barrages à l’arrivée de la flotte.  La  plupart des flotteurs venaient de Niederhoff. Ces radeaux de bois descendaient vers Sarrebourg, Trèves et même Coblence, ces planches servaient en particulier à la construction de bateaux en Hollande. L’autre technique était «  le flottage à bûches perdues » pour le bois de chauffage. Il se pratiquait au mois d’octobre, lorsque le bois était bien sec, afin qu’il ne coule pas (article de Roland Kleine).  

A propos de scieries de la vallée du Blanc Rupt : article d’Etienne André l’Essor n°156 : de l’amont vers l’aval: la scierie du Pâquis a cessé son activité peu après la guerre de  1914, la scierie de la Noire Basse détruite  par  la foudre vers 1880, la scierie de Herlepont, la scierie du Pêcheur, la scierie du Port, la scierie du Château, la scierie du Bally, la scierie du Marquis en activité jusqu’au début de la dernière guerre, la scierie de Ricarville en service jusqu’en 1949, la scierie de Petitmont, la scierie de la Basse Léonard,, la scierie Febvrel et d’autres dans  les « basses » adjacentes telles  la scierie de la Princesse dans  la Basse Léonard, la scierie du Houzard dans  la basse du même nom pratiquement intacte vers 1936, mais non en activité.

A propos des forêts de la vallée du Blancrupt : les forêts de la rive droite sont des forêt domaniales : Forêt Domaniale d’Abreschwiller, Forêt Domaniale de St Quirin. Les forêts rive gauche sont privées.

D’un article de l’Essor n°156 de M. Georges EPPE, j’extrais ces lignes sur  la Forêt des Marches Forêts Chevandier dite Forêt de la Comtesse (à l’Est de Cirey sur Vezouse) : «  pour  mieux situer l’importance de la forêt, nous citerons à titre indicatif la consommation de bois de la glacerie de Cirey en 1926 : 25 300 stères par an, la faïencerie Pacotte de Cirey 1500 stères par an. Bertrambois possèdait deux poteries dont l’une appartenait à la princesse de Poix, Hamoze avait aussi sa faïencerie, Frémonville sa tuilerie. Saint-Quirin, Monthermé avaient aussi leur verrerie.

La famille Chevandier  de Valdrôme possédait 2500 ha de forêts  au moment où les héritiers en prirent possession. Mais de nombreuses donations ou legs à des paroisses du proche secteur, ou pour la construction des asiles, des écoles et orphelinats avaient été faites.

C’est dire l’importance de la forêt fortement malmenée à cette époque pour alimenter les fours.  

Cette revue l’Essor de Schirmeck est une mine de renseignements pour évoquer la vie de ces  montagnes et vallées.

 

 

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